La porte de l'ascenseur s'ouvre. Des fenêtres du couloir transparaissent la lumière du soleil déclinant. Nous sommes à la fin avril, un peu avant le salaire, et je sens déjà d'ici le goût du curry. Je rentre.
- karê ii desu ka?
- iin janai?
Nous n'entendrons pas le staccato du couteau raccourcissant sans pitié la ciboule. Cela sera sans doute pour le troisième jour où le fond du nabe (la casserole) ira rejoindre le tsuyu (bouillon) pour les nouilles de soba ou d'udon. La ciboule accompagnera avantageusement cette énième variation du curry de base - ni japonais, ni indien, un simple arrangement personnel entre Elle et son livre de recette.
Il existe une relation charnelle avec le curry, nikomimono (plat mijoté) économique, qui "tient" (motsu) plusieurs repas. Un plat de l'attente pour tenir la fin du mois. Mais il ne se réduit pas à cela.
Ici point de "leu"* - base de sauce déjà préparée [vendu dans une épicerie japonaise mais inabordable] - mais une partition complète mise en musique.
D'une part les épices. Sélectionnées, broyées - quand il le faut -, mélangées, elles ont pour mérite d'offrir un résultat final toujours unique. Chaque Curry reste une nouvelle rencontre.
Ensuite les oignons, l'ail, le gingembre, les tomates...etc, passés au beurre d'isigny jusqu'à ce que le mélange épais brunisse de belle façon. Puis seront rajoutés le reste des ingrédients : carottes, pommes de terre, viande et/ou légumes, selon l'humeur du moment.
Chauffé. Réchauffé. Réchauffé. Réchauffé. A chaque jour suffit sa peine, mais pour le curry - qui ne se réfrigérie pas - des cuissons répétés sont nécessaires (hi wo tosanakkya ikenai).
L'assiette creuse française se marie bien avec le plat. Le riz se place à l'opposé du consommateur, le ragoût proche de lui.
Ah oui, à ne pas oublier les tsukemono (pickles) maisons - avec les légumes d'ici - posés sur le riz et dont la grande qualité est de relever le goût du plat.
Où l'on découvre que le radis s'accommode de tout.
Eeto, de Paris
* issu du terme culinaire français "roux", selon l'ami wiki.
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